Victoire des salarié-es du nettoyage à Jussieu (Sorbonne Université) face à l’entreprise « Arc-en-ciel » : la lutte paie !

30 Sep 2021

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Depuis environ 15 ans, le nettoyage du campus Jussieu est assuré par des salarié-es de sociétés sous-
traitantes, aux pratiques illégales honteuses. Les agents du nettoyage, dont le travail permet aux personnels et

étudiant-es de travailler et étudier dans des locaux propres, sont ainsi soumis à des conditions de travail
inacceptables : cadences infernales, salaires très bas, menaces et pressions sur les salarié-es pour leur faire
accepter des modifications arbitraires de leur contrat ou de leurs conditions de travail…
Ces mauvais traitements sont à mettre en perspective avec les multiples couches d’oppression que les
salarié-es subissent : racisme, sexisme et classisme, qui interagissent et s’ajoutent à la dévalorisation du
travail effectué. Cela est notamment le cas pour les femmes, qui sont particulièrement touchées par les
changements d’horaires imposés, souvent incompatibles avec leurs obligations familiales. Par ailleurs, les
problèmes de faible compréhension du français oral ou écrit de certain-es salarié-es ont permis à Arc En Ciel
de leur faire signer des contrats de CDD antidatés en lieu et place de leurs CDI, afin de mettre fin à leur
travail.

Excédées par cette situation, notamment par la hausse brutale de leur charge de travail suite au non-
renouvellement de plusieurs collègues en CDD, et l’annonce d’un fractionnement des journées de travail, les

130 personnes, en grande majorité des femmes, employées par la société de sous-traitance « Arc-en-ciel
Environnement » se sont mises en grève à partir du 14 septembre. Après huit jours d’une grève
massivement suivie, avec le soutien de syndicats de l’université dont la section SUD Éducation, les
grévistes ont obtenu satisfaction sur leurs revendications :
• pas de fractionnement des journées de travail
• non-application de la clause de mobilité (inscrite sur les contrats de travail, cette clause permettait à la
direction de muter les agents sur toute la région parisienne, au gré de ses besoins)
• aucun licenciement
• remplacement des absences
• paiement des sommes dues pour les heures travaillées et non payées, notamment les heures
supplémentaires
• régularisation des contrats de travail
• fourniture de produits d’entretien non allergisants
• départ du responsable d’exploitation du site, au comportement irrespectueux envers les agents
• paiement de 50 % des jours de grève
Si les 130 agents de Jussieu ont gagné face à une entreprise au chiffre d’affaires de 23 millions d’euros
et employant 1000 salarié-es, c’est avant tout parce qu’ils et elles ont su rester soudé-es tout au long du
mouvement, débattant quotidiennement la poursuite de la grève, en fonction des avancées obtenues face à
l’employeur. C’est aussi parce qu’ils et elles ont été appuyé-es au quotidien par les militants syndicaux de
l’université, pour tous les aspects de la grève; les syndicats ont aussi pesé sur l’administration de l’université
pour qu’elle fasse pression sur l’entreprise. C’est enfin parce qu’une très forte solidarité des personnels et des
étudiant-es de l’université s’est exprimée tout au long de la grève : pétition massivement signée, dons à la
caisse de grève, démarches de responsables de laboratoire auprès de la direction de l’université,
applaudissements dans les amphis lors des manifestations quotidiennes sur le campus, affichages, motions de

soutien, etc. Le soutien extérieur a aussi été précieux : rassemblement de solidarité médiatisé, contributions
importantes d’autres syndicats à la caisse de grève, préparation d’une manifestation au siège de l’entreprise
Arc-en-Ciel, etc. Ce mouvement de solidarité est encourageant pour les luttes à venir, par exemple celles des
personnels précaires de l’université (vacataires, doctorant-es sans financement…), dont le travail, bien que
plus valorisé socialement, est également minimisé et invisibilisé.
Cette grève est une nouvelle démonstration éclatante qu’une lutte unitaire, déterminée et organisée des
travailleuses et des travailleurs peut les mener à la victoire, et cela même si les grévistes sont parmi les
travailleur-ses les plus précaires du site. Cette victoire fait écho à celle des femmes de chambre de l’hôtel Ibis
Clichy-Batignolles, qui sont d’ailleurs venues soutenir leurs collègues.
Cette grève a donné à voir les aspects les plus sombres de la sous-traitance, allant jusqu’à la
maltraitance quotidienne et au travail sans contrat et/ou non-rémunéré. L’une des pancartes brandies par les
grévistes portait le slogan : « En grève pour le respect ». En effet, il a fallu huit jours de grève et des
négociations serrées, juste pour obtenir que des garanties inscrites dans le droit du travail, voire dans
le droit tout court, soient respectées au sein de l’université ! Cela est indigne du service public et de
l’université. De plus, l’attitude de la direction d’Arc-en-Ciel et de ses « syndicats maison » lors des
négociations a été abjecte : d’abord un refus de mettre par écrit les engagements, puis la communication d’un
protocole d’accord avec une date de reprise erronée, en passant par des rendez-vous non honorés, le refus de
rencontrer une délégation de grévistes, des menaces de sanctions, la perturbation des assemblées de grève par
des « représentants du personnel » aux ordres, l’envoi de fausses informations à la direction de l’université,
etc.
Cette grève est aussi là pour nous montrer à quoi sert la mise en concurrence dans les marchés
publics. Au gré des changements de prestataires, les agents de nettoyage restent les mêmes (certains y
travaillent depuis 25 ans !) : ce sont elles, ce sont eux qui connaissent le campus, ses amphis, ses espaces
extérieurs, ses couloirs, ses labos. La seule fonction des entreprises sous-traitantes, dont la mise en
concurrence favorise toujours le moins-disant, n’est pas d’améliorer la qualité du service rendu mais de
réduire les coûts pour le compte du « donneur d’ordres » (l’université), en pressant les salarié-es au
maximum, au besoin par des méthodes illégales. Au passage, la sous-traitance crée des « angles morts » en
déresponsabilisant l’université vis-à-vis des conditions de travail de certaines catégories de personnes qui
travaillent pourtant sur ses campus. La pratique de la sous-traitance doit cesser ! SUD Éducation exige
que les travailleuses et travailleurs intervenant pour des tâches régulières dans le service public d’éducation,
d’enseignement et de recherche bénéficient tou-tes du statut d’agent titulaire de la fonction publique. C’est aux
établissements et aux ministères concernés de prendre leurs responsabilités, car ils ne peuvent pas ignorer
que la sous-traitance engendre des violations systématiques des garanties élémentaires sur les conditions de
travail, notamment envers des femmes et des personnes racisées qui sont déjà parmi les plus précaires dans
l’échelle sociale.
Dans les semaines et les mois à venir, nous resterons mobilisé-es, aux côtés des salarié-es, pour veiller
au respect des engagements pris par l’entreprise Arc-en-ciel. La force collective acquise, et l’importance du
soutien reçu, leur permettent d’envisager une nouvelle grève si ces engagements ne sont pas tenus.

Section SUD Éducation Sorbonne Université